L'hyperacousie est un dysfonctionnement de l'audition, caractérisé par une hypersensibilité de l'ouïe.
Il s'agit d'un surdéveloppement des fonctions auditives et/ou de leur interprétation par le cerveau.
C'est une réaction anormale de l'oreille, qui a perdu son appréciation du niveau de volume des sons, et induit le cerveau à interpréter en permanence ce qui lui est transmis comme ayant une intensité quasi maximale.
L'audition des sons courants devient désagréable, voire insupportable et parfois même douloureuse, car les seuils d'inconfort auditif sont proches des seuils d'audition.
Les conséquences sont les suivantes :
- j'entends sans "tendre l'oreille" les sons faibles ou lointains que les autres n'entendent pas
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certains sons ou niveaux sonores, qui ne sont pas perçus par les autres comme forts ou désagréables, sont vécus comme pénibles, voire douloureux
- mon spectre auditif étant différent de ce que la société prévoit , j'ai des difficultés d'échantillonnage des sons, car je suis envahi d'informations : ainsi, par exemple, il m'est difficile de suivre une conversation dans le brouhaha d'un restaurant, où j'entends avec détail les conversations de toutes les tables voisines, la soufflerie de la climatisation, les bruits de verre au bar, la porte d'entrée qui s'ouvre et se ferme, ainsi que la musique de fond
- étant donné que mes dérèglements auditifs me rendent plus sensible à certaines fréquences qu'à d'autres, beaucoup d'appareils radio et TV me sont inadaptés, il faut que je filtre la bande passante au moyen d'équaliseurs de sons afin d'entendre ce qui est réellement joué
- je suis incapable d'émettre une opinion objective concernant la sonorité d'un instrument de musique, ou la qualité de la balance des sons d'un enregistrement
- je suis très sensible à la musique, mais ne puis supporter les morceaux utilisant les fréquences les plus sensibles de mon audition, c'est ainsi, qu'entre autres, je ne supporte pas la musique de Mozart tant chérie par nos contemporains
Il me faut donc survivre avec cet énorme handicap : vivre malgré une intolérance généralisée à la majorité des bruits quotidiens, y compris ceux que les gens "normaux" ne remarquent pas ou ne considèrent pas désagréables. Et le monde sonore qui m'entoure m'étant le plus souvent inadapté, celui-ci m'agresse, m'irrite, voire m'angoisse.
Hyperacousie et acouphènes
L'hyperacousie n'a aucun rapport avec les acouphènes, qui, eux, sont beaucoup mieux connus et étudiés. Malheureusement, l'hyperacousie est très rare, et les acouphènes très fréquents, si bien que beaucoup de médecins eux-mêmes confondent les deux.
Les acouphènes sont des illusions de bruits parasites inexistants (sifflements, bourdonnements).
Souvenir d'une visite médicale à l'âge de dix ans
La science ne trouve pas ce qu'elle ne connaît pas.
Tout est prévu pour déceler et mesurer la surdité.
Mais l'hyperacousie -trop bien entendre et en souffrir- n'est hélas jusqu'ici exclusivement connue que par certains milieux spécialisés de la recherche.
Je me souviens de cette visite médicale à l'âge de dix ans, où l'infirmière faisant passer des tests me demandait si j'entendais tel et tel son, diffusé dans un casque relié à un générateur de fréquences. A plusieurs reprises, elle fut étonnée de ma perception de sons hors normes, très aigus, très graves, ou très faibles. Elle essaya même de me tromper pour s'assurer que j'entendais bien les fréquences en question. Elle était stupéfaite, et venait de mettre en évidence, sans s'en rendre compte, mon hyperacousie.
Mais puisque la médecine cherche à repérer les sourds et non les sur-entendants, ce fut sans conséquences, excepté un rapport mentionnant un parfait 10/10 aux deux oreilles. Ce qui est toujours le cas maintenant d'ailleurs, malgré l'âge qui avance.
Bien dommage qu'une prise en charge n'ait pu avoir lieu à cette époque : je haïssais les cours d'école trop bruyantes, et commençais par là même à me désocialiser. Ce n'est que plusieurs décades plus tard qu'on comprend pourquoi. Beaucoup trop tard.
Durant toute ma vie, le premier critère de mes choix a été la recherche d'endroits très silencieux : aussi bien dans mes lieux de vie (vitrage acoustique, impasse à la campagne) que mes positions dans les salles (au fond, loin des hauts parleurs), l'évitement de certaines réunions bruyantes, des lieux de sortie, etc.
Il est possible actuellement d'objectiver l'hyperacousie par les émissions de Otto.
Elles analysent le fonctionnement des cellules ciliaires.
Causes possibles
L'hyperacousie peut provenir de divers causes, jusqu'ici peu connues, car il s'agit d'un domaine très spécifique, et elle n'est présente que chez 2% de la population.
- Exposition actuelle ou ancienne à des bruits trop élevés (traumatisme sonore)
- Traumatisme crânien
- Prise de certains médicaments
- Dérèglements thyroïdiens
- L'autisme et le syndrome de Williams (désordre génétique)
- Malformation congénitale
- Maladies ou déformations de l'oreille interne
- Etat d'éveil généré par un événement traumatique
Traitements possibles
Les patients qui souffrent d'hyperacousie sont souvent tentés de s'isoler du bruit environnant en portant des bouchons d'oreilles ou des boules " Quiès ". Bien que cette méthode puisse soulager temporairement, elle conduit à terme à amplifier la perception des sons et donc à augmenter l'hyperacousie.
Il demeure cependant recommandé de protéger ses oreilles dans les situations d'exposition aux niveaux élevés de bruit qui représentent un danger certain pour l'ouïe (discothèques, concerts, machines industrielles ....).
Il faut soumettre l'oreille à un bruit de fond minimum pour la " désensibiliser " des bruits forts. L'absence totale de bruit est assimilée par le cerveau à une perte auditive importante et produit alors un phénomène d'amplification spontanée de l'oreille interne et des structures nerveuses qui y sont connectées avec création d'un effet inverse à celui recherché.
Une technique de soins assez récente consiste en une aide instrumentale procurée par des générateurs de bruits qui vont délivrer un léger bruit de fond à large bande. C'est ce qu'on nomme la TRT (Tinnitus Retraining Therapy), qui peut bien fonctionner chez certaines personnes.
Conclusion
Cette particularité a teinté toute ma vie et m'a amené à prendre des directions et des choix souvent étonnants, totalement incompris. Avant le diagnostic par les "émissions de Otto", je n'en étais pas conscient, je n'aurais pas pu l'expliquer à mon entourage.
Car cela ne se voit pas, et personne ne pourrait imaginer ce que cela implique comme souffrances quotidiennes.
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