François Calay

Victime ... irresponsable ?

victimeEtre la victime de ses propres choix

Sommes-nous acteurs de notre vie, ou nous positionnons-nous en victimes, irresponsables de ce qui nous arrive ?

Observons la diversité des possibilités : victime d'erreurs médicales, victime d'une maladie, victime d'un accident, victime de la souffrance, victime de l'éducation, victime de la société de consommation, victime de la prétendue tradition judéo-chrétienne, victime de la pollution, victime d'un système politique, victime de son patron, de son conjoint, du bruit des voisins, du manque de pluie, ...

Sommes-nous victimes ?
... ou plutôt irresponsables (tout au moins partiellement), car nous sommes la propre victime de nos mauvais choix :

- car on n'a ni vu, ni voulu entendre, ni eu l'intuition (parfois même irrationnelle) de la présence du danger
- car on n'a pas eu la force de réagir, de prendre les bonnes décisions au bon moment
- car on a mal estimé les limites d'un système, on a surestimé sa force
- car on s'est entouré de prétendus conseillers mal choisis, surtout s'ils sont largement diplômés et sécurisants dans ce qu'ils ont à 'vendre' : politiciens, comptables, médecins, architectes, avocats, assureurs, ...

"Celui qui veut faire quelque chose trouve un moyen, celui qui ne veut rien faire trouve une excuse." (Anonyme)

La victimisation

La victimisation est le processus par lequel une personne, qui a vécu une situation traumatisante, a intégré la position de victime dans son psychisme à un tel point qu’elle ne connaît plus d’autre rôle que celui là, et qu'elle va le rejouer perpétuellement de façon consciente ou inconsciente. Ceci est applicable dans tous les secteurs de la vie : intimité, relations interpersonnelles, travail, et même loisirs !

La victimisation est "intégrée" lorsque le survivant pense que, quelle que soit la situation, il ne pourra de toute façon rien faire, qu’il sera impuissant, qu’il n’aura pas le contrôle et qu’il n’existe pas d’autre solution que celle où il jouera le seul rôle appris, celui de victime.
Ce rôle, qu’il connaît bien, lui donne un sentiment de familiarité, et lui permet d’avoir paradoxalement l’illusion de contrôler la situation.

Les bénéfices secondaires de la victimisation sont très grands. Lorsque nous nous comportons en victime dans une situation donnée, nous pouvons en retirer comme avantages : de l’amour, de l’attention, de la crédibilité, de l’argent, une possibilité de ne pas avoir à gérer la confrontation. Le rôle de victime ? ... un grand confort ... du moins ... durant un certain temps ...

Le triangle dramatique : victime, sauveteur, persécuteur

C'est en 1968 que Steven Karpman, psychologue américain spécialisé en analyse transactionnelle, décrit le "triangle dramatique" : un stratagème que nous jouons dans un mouvement tournant entre victime, sauveteur et persécuteur.
C'est un jeu psychologique souvent inconscient et toujours toxique. Mais ... nous passons les trois quarts de notre temps dans l’un ce ces trois états : "victime", "sauveteur", ou "persécuteur" !

- La victime : c'est le rôle principal, celui qui apporte le plus de gratifications, de bénéfices secondaires et de reconnaissance. Me présenter en victime consiste à me plaindre de façon constante d'un préjudice que j’ai subi (réellement ou que je considère comme tel) ou que j'ai contribué à mettre en place. La victime est la personne qui en réalité engage la dynamique du triangle.
Exemples : "Je suis débordé de travail", "Je suis incapable de m'en sortir", "C'est affreux ce qui m'arrive !", ...

- Le sauveteur : au départ, le sauveteur agit toujours avec une bonne intention. Il est convaincu qu'il doit absolument faire quelque chose pour aider l'autre, croit savoir mieux que quiconque ce qu'il faut faire, se sent indispensable et irremplaçable, fait les choses à la place de l'autre même si on ne lui a rien demandé. Mais il n'est pas efficace, car son but inconscient est d'entretenir la victime dans son rôle pour rester dans le sien et obtenir de la reconnaissance.
Ce que le sauveteur cherche, c'est de la restauration narcissique : ce rôle augmente l'estime de soi lorsqu'elle est très défaillante, voire inexistante. Cela amène un sentiment de bien être, une raison d'exister, d'être apprécié et aimé.
En résumé : je suis sauveteur quand j'aide quelqu'un qui n'a rien demandé, quand j’aide quelqu’un au-delà de mes capacités et au détriment de mon bien être et de mes besoins, ou que je persiste à donner de l’aide à tout prix.
Exemples : "Je me charge de tout", " Racontez moi vos malheurs, je vous comprends", " A votre place, …", ...

- Le persécuteur : il peut être réel ou fictif, perçu et jugé comme tel par la victime, même si ce n’est pas la réalité. Dans la réalité, il peut agresser physiquement ou psychologiquement. Le persécuteur cherche souvent à se venger d'une frustration. Il impose des règles sévères qui doivent être respectées à la lettre, surveille attentivement le comportement de l'autre et au moindre écart, intervient sévèrement.
Le persécuteur est complètement tourné vers sa victime qu'il assujettit, culpabilise, domine, effraye, frappe, humilie, insulte, manipule, menace, violente, tyrannise. Il s'imagine ainsi dominer les autres, mais rien n'est moins sûr à long terme, car la victime peut se rebeller, ou un sauveteur peut venir au secours de celle-ci.
Exemples : "Maintenant je tiens ma revanche" " Vous n'en seriez pas là si vous m'aviez écouté", " Je ne veux pas vous blesser, mais je serai franc avec vous", "Tu es nul/le, tu ne vaux rien", ...

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fleurUn individu n'aura pas uniquement le comportement d'un sauveteur, d'un persécuteur ou d'une victime mais il sera les trois à la fois à des moments différents selon la situation donnée.
Ce triangle est dynamique, c'est-à-dire que selon le développement du scénario mis en place, les trois participants au triangle dans une même histoire peuvent changer de rôle plusieurs fois, passant de victime à agresseur, de victime à sauveteur et ainsi de suite.

Prenons l'exemple d'un sauveteur déçu de voir son action non reconnue :
- il se transformera d'abord en persécuteur, en insultant, menaçant, manipulant la victime
- puis, si la victime ne cède pas, le persécuteur se transformera lui-même en victime : "Quoi que je fasse, personne ne m'aime !"

Le triangle dramatique est tellement répandu, et applicable à tous les niveaux de dimensions de vie, que je le définirais comme un archétype au sens Jungien du terme !

L'endoctrinement politique et religieux

L'histoire l'a malheureusement trop bien illustré : pour asseoir un pouvoir politique ou religieux sur un peuple, il suffit :
1- de l'endoctriner en lui faisant croire qu'il est victime de quelque chose
2- de dénoncer un agresseur présumé
3- de se positionner en sauveteur, qui va combattre l'agresseur en question et donc 'libérer' le peuple. Cela permet de récolter tous les suffrages, d'imposer un pouvoir fort, voire une dictature.

On retrouve ce fonctionnement de tout temps dans l'histoire de l'humanité : aussi bien depuis les récits bibliques que dans les événements récents : génocides et racisme, menace écologique, lutte contre le 'terrorisme' ou contre la 'crise' économique, ...

Utiliser un autre mode relationnel

Il est essentiel de repérer le rôle qu'on est soi même amené à jouer dans notre vie et/ou dans celle des autres, afin d'essayer de ne pas se retrouver prisonnier du triangle dramatique.

C'est tout un travail, qui implique de s'ouvrir à un autre mode de relations, basé sur
- la pose de limites personnelles claires
- la sûreté de soi, le développement personnel
- la bienveillance, l'écoute, l'empathie, la sécurité
- la collaboration, la générosité, le partage
- la communication, l'échange, le partenariat.

Mais est-il possible d'aller à l'encontre d'un fonctionnement archétypique ... ?

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- "Je suis protégé(e) par la force de mon être."
Anonyme

- "Il faut du courage pour être heureux."

Anonyme


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