Il y a l'humiliation, la culpabilité, mais surtout .... la colère profonde.
Colère contre moi-même, contre les erreurs qui ont provoqué l'accident.
Colère contre les événements, la vie, l'inconscient, le hasard, Dieu, ...
Pourquoi moi ?
Colère contre les personnes qui ont contribué à créer les circonstances de l'accident.
Colère contre une partie du corps médical : sa déshumanisation, son manque d'écoute et de finesse, ses erreurs, ses incompétences, son manque d'accompagnement, son indifférence.
Colère contre un certain nombre de gens (certains ne sont même pas venus me voir à l'hôpital), ces connaissances proches ou lointaines qui ne comprennent rien, qui n'ont jamais pris conscience de quoi que ce soit ...
Colère contre la majorité de ces inspecteurs, contrôleurs, fonctionnaires des dossiers de survie, organismes de réintégration, visites médicales complémentaires de toutes sortes, services pseudo-sociaux incapables de réagir dans l'urgence, suspicieux ou narquois.
Colère contre certains groupes prétendus d'écoute ou d'entraide : des groupes psychologiques, pseudo-psychologiques ou spirituels dans lesquels j'ai traîné, et dont les vérités proclamées ne correspondaient pas à ma réalité.
Colère contre les incendies de maisons, de forêts, de prés, auxquels j'ai assisté depuis 1982.
Colère contre ce magasin en feu en 1985 à Londres en face de mon hôtel, en pleine nuit.
Colère contre cette personne pyromane qui a mis le feu à mon pré - et quasi à ma maison - en 1993.
Colère contre cette nuit à Spa en 2004, où 7 maisons ont brûlé. Je logeais dans mon bureau en face, j'ai été réveillé par l'éclatement des tuiles et j'ai assisté à tout.
Colère contre ces personnes capables de me dire encore 'je suppose que maintenant votre accident est totalement oublié et que tout est arrangé'.
Colère contre la douleur, qui n'est apaisée par moments que par des produits dérivés de la morphine ou de l'opium - avec les effets secondaires qui en découlent.
Colère contre ce psychisme qui me fait parfois vivre dans l'anxiété, la révolte, la méfiance, la peur, le dégoût, avec des périodes où j'ai eu le désir de "m'envoyer en l'air", faisant des dégâts en moi et autour de moi.
Colère contre la médecine actuelle, totalement segmentarisée et déshumanisée ...
La colère a son utilité lors d'un combat ou de toute autre situation dangereuse. Elle nous stimule et contribue à notre survie.
Dans bien des cas, il s'agit d'une réaction qui convient à une situation où la vie est menacée, et elle est indéniablement préférable à la paralysie engendrée par la peur.
Mais c'est une réaction qui n'est plus utile à notre survie, une fois le danger écarté.
En fait, comme chacun le sait, la colère peut occasionner de graves problèmes quand elle continue à inonder notre quotidien ...
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" Qui apaise la colère éteint un feu; qui attise la colère, sera le premier à périr dans les flammes."
Hazrat Ali