La distraction, sujet tabou ?
On emploie peu le terme de "distraction" dans les conversations quotidiennes.
Même sur internet, on en parle très peu, hormis des allusions aux distractions inappropriées de certains enfants, ou d'adultes stressés ayant des difficultés de concentration. La "distraction" est donc présentée comme quelque chose de plutôt négatif à éviter.
Dans notre société, où tout est basé sur la consommation et la rentabilité, on parle plus volontiers d'activités déstressantes, de préférence accompagnées d'une cotisation, de déplacements en un lieu spécifique, d'un équipement, avec obligation de résultats, "vous comprenez bien qu'à ce prix-là, c'est indispensable".
Et pourtant ... je pense que pour certaines personnes, dont je fais partie, il est essentiel de (re)découvrir la distraction basique, avec de petits moyens à portée de main.
Se distraire pour échapper à l'obsession
Distraire = dis- tractere : tirer dehors
Un esprit obsessionnel, préoccupé, inquiet, a besoin d'être "dis-trait" pour ne pas s'enfoncer dans la spirale de la souffrance.
La distraction réelle n'est pas une passion qui obsède l'esprit, c'est une évasion simple, temporaire, qui procure un bien-être évident.
Certains cerveaux, tel le mien, ne s'arrêtent jamais, et pensent 24h/24 avec une intensité épuisante. Cela tourne parfois en boucle sur certains questionnements, et peut prendre des allures obsessionnelles à glissements morbides.
Alors, voici comment je procède :
- le premier procédé, c'est d'appliquer ce que j'appelle le "principe de la moindre obsession" : je remplace volontairement une obsession lourde, difficile, angoissante (exemple : une relation difficile avec un de mes proches) par une obsession matérielle toute simple, choisie dans un panel déplaisant qui m'est personnel (exemple : la direction de ma voiture qui tire à droite). Dès lors, j'amorce une boucle sur ce sujet émotionnellement peu chargé, aux implications peu stressantes, et mon cerveau se met à tourner sans impliquer toutes sortes d'émotions difficiles. Je le laisse tourner sur ce sujet, et me repose, nerveusement tout au moins.
- le deuxième procédé, c'est de me distraire de manière efficace, d'où le thème de cette page : je choisis, parmi quelques distractions simples que j'ai appris à connaître, celle qui convient au temps et à l'espace dans lesquels je me trouve. Et cela déconnecte la boucle obsessionnelle, j'entre dans un véritable repos, même si la distraction a parfois des allures étonnantes, telles par exemple le fait de jouer un morceau de musique en boucle pendant plus d'une heure.
Quels types de distraction ?
Pour rester dans l'instant présent et en savourer la fluidité, il me faut un système de distraction simple, de préférence physique : ici et maintenant, ressentir mon corps, l'air ambiant, humer les odeurs, me concentrer sur ce que je fais et n'avoir aucune pensée me détachant du réel.
Une de mes distractions favorites est de mettre un morceau de musique et l'accompagner à la basse électrique.
Je trouve également beaucoup de repos et d'apaisement dans les travaux automobiles et les réparations du bâtiment.
Puis il y a toutes sortes d'autres domaines variés : la photographie, la marche, la natation, l'observation ornithologique, etc.
Il s'agit en fait de faire fonctionner plusieurs des cinq sens, pour avoir un accrochage au réel le plus intense possible. Cela se voit très bien dans les exemples ci-dessus : la vue, l'audition, le toucher sont essentiels dans ces activités.
Comme le disait si bien Françoise Giroud : "l'homme sait faire de beaux jouets pour se distraire de sa condition".