La plus grande humiliation est le récit paru dans le journal régional du lendemain, et où l'on racontait mensongèrement l'histoire de mon accident.
Elle faisait de moi un véritable imbécile,
kamikaze ou incompétent : le journaliste annonçait
que je "soudais un réservoir d'essence".
Or il n'y a ni soudure ni réservoir dans mon histoire : il y
a une disqueuse et un jerrycan.
Souder un réservoir d'essence, c'est de l'inconscience
ou de la folie. Jamais je n'aurais fait une chose pareille.
Mais plus de vingt ans plus tard, ce récit erroné traîne encore
dans les esprits de certains, ce qui m'humilie profondément.
Indépendamment même de cela, je suis toujours sous le choc irréversible de l'ensemble des circonstances réelles qui ont provoqué mon accident.
Heureusement, cette humiliation a ceci de positif qu'elle augmente ma force de résilience.
L' erreur que je me pardonne difficilement, c'est de ne pas avoir été capable de discerner les travaux qu'il fallait accepter ou refuser, car je n'avais pas suffisamment de vigilance commerciale par rapport à ce qui m'était demandé ou proposé.
Une autre pénible et longue humiliation, c'est celle que j'ai vécue
durant l'hospitalisation, par l'absence de toute explication sur les gestes médicaux posés,
par l'absence totale d'aide psychologique, et par la pauvreté de l'écoute et du dialogue.
A tout moment, il fallait revendiquer
vis-à-vis du personnel soignant (à quelques exceptions
près) mon statut de personne humaine. C'est inimaginable et incompréhensible
pour celui qui ne l'a pas vécu.
Cela augmentait encore ma colère profonde.
... Heureusement qu'aux limites de la mort, j'avais
trouvé certaines forces ... car la survie n'était pas facile dans
les lieux où elle aurait dû être à l'honneur ...
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La majorité des examens médicaux que j'ai vécus en 2006 et 2007 m'ont permis de me rendre compte que la médecine actuelle, totalement segmentarisée, est encore moins à la rencontre d'une personne humaine que celle de jadis.
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"Rien n'est humiliant comme de voir les sots réussir dans
les entreprises où l'on échoue."
Gustave Flaubert
"L'avancée spirituelle, c'est aussi la capacité de pouvoir vivre au quotidien l'humilité, et que celle-ci ne soit plus humiliation parce que mon âme s'est débarassée de l'orgueil."
L'auteur, novembre 2009